Avant de quitter Wellington, William Wilson posa fièrement devant sa nouvelle maison avec son épouse, Bridget, et leur jeune bébé, Jean.

La photo prise à ce moment précieux l’accompagna durant toute sa campagne sur le front occidental : il la portait dans la poche de son uniforme jusqu’au 4 novembre 1918, jour où il fut grièvement blessé lors de la bataille de Le Quesnoy.
William mourut ce même jour, laissant derrière lui Bridget et Jean, mais toujours avec lui cette photo si chère.
Près de 107 ans plus tard, sa tombe à Ruesnes, dans le Nord de la France, a reçu la visite de proches venus de Nouvelle-Zélande.
Le voyage de Desiree et Neil
Desiree et Neil Jury, originaires de Whitby en Nouvelle-Zélande, se sont rendus à Le Quesnoy afin de retracer le parcours militaire de leurs familles pendant la Première Guerre mondiale.
Avant de se recueillir sur la tombe de William, le couple s’est incliné devant celle de l’arrière-grand-oncle de Desiree, George Henry Hodgson, mort en 1917 à Passchendaele et dont le prénom fut transmis au père de Desiree.
Les Jury étaient très préparés et documentés pour ce pèlerinage : Desiree est docteure en romans historiques anglais modernes et passionnée d’histoire militaire, tandis que Neil a servi de nombreuses années dans la Marine néo-zélandaise.
Mais ce n’est qu’en foulant les champs de bataille de Flandre et en entrant dans les remparts de Le Quesnoy qu’ils ont pleinement mesuré l’ampleur du sacrifice néo-zélandais durant la Grande Guerre.


« C’est bien plus que ce que j’imaginais », confie Neil.
Le couple a été profondément marqué par l’exposition du Musée Néo-Zélandais de la Libération – Te Arawhata :
« Ce qu’ils ont accompli est impressionnant. L’atmosphère, la dignité, le respect des personnes, la diversité des récits – il y a plus à découvrir qu’en une seule visite », explique Desiree.
Neil ajoute qu’il a ressenti une multitude d’émotions en parcourant le Musée :
« Beaucoup de tristesse, beaucoup d’admiration pour ceux qui ont rendu ce Musée possible, et bien sûr une immense fierté pour l’héroïsme et la persévérance de ces jeunes hommes.
Je suis très conscient du gâchis de vies humaines, de l’impact sur ceux qui ont survécu et sont rentrés, et de la difficulté de retrouver une vie ordinaire – gagner sa vie, fonder une famille, tout simplement vivre. »
Le Rifleman William Archibald Wilson, MM
William, parent de Desiree par un cousin, grandit à New Plymouth et devint conducteur de locomotive pour le New Plymouth Harbour Board. Il épousa Bridget en 1915, et Jean naquit en 1917.
Il s’engagea le 23 juillet 1917 et embarqua cinq mois plus tard, la veille du Nouvel An. Après un entraînement complémentaire au Royaume-Uni, William arriva en France au moment où l’armée allemande lançait sa vaste offensive du printemps 1918, destinée à submerger les Alliés avant l’arrivée en masse des renforts américains. Les Néo-Zélandais furent dépêchés sur la Somme pour combler une brèche dans les lignes britanniques – une action décisive qui mit un terme à l’offensive allemande et ouvrit la voie à la contre-attaque alliée connue aujourd’hui comme les « Cent Jours ».

Bientôt, William approcha de Le Quesnoy – une ville occupée, fortifiée 250 ans plus tôt par le célèbre architecte militaire Vauban. Entourée de puissants remparts et bastions, la libération de Le Quesnoy représentait un défi majeur, d’autant plus que la décision avait été prise de ne pas bombarder la ville afin d’éviter des pertes civiles.
Le 31 octobre, William participa à une patrouille visant à évaluer la force des défenses allemandes autour de la vieille ville.
Extrait de la London Gazette :
« Le Rifleman Wilson prit part à un raid en plein jour sur une position ennemie, après être déjà sorti avec un officier pour en faire la reconnaissance. Il avança avec une mitrailleuse Lewis et réussit à l’installer de manière à prendre de flanc la position ennemie et à fournir un tir de couverture à la patrouille, bien que sa propre position fût totalement exposée. Grâce à cette arme, il apporta une aide précieuse à la patrouille et assura sa retraite avec les 38 prisonniers capturés. Bien qu’exposé aux tirs ennemis couvrant la position conquise, il resta à son poste jusqu’à ce que la patrouille ait pu se retirer en sécurité. »
Cet acte de bravoure valut à William la Military Medal.
Le 4 novembre, alors que la Division néo-zélandaise contournait et dépassait Le Quesnoy, William fut tué avant l’assaut final du Rifle Brigade qui aboutit à la libération de la ville.

L’importance du souvenir
William repose au cimetière communal de Ruesnes aux côtés de 86 autres soldats du Commonwealth – dont 8 Néo-Zélandais.
Desiree et Neil ont exprimé l’honneur ressenti en lui rendant hommage, tout en s’interrogeant sur la fréquence des visites reçues par les autres jeunes hommes enterrés là.
Leur message est clair :
« Cela fait partie de notre identité. C’est une part de qui nous sommes. Si nous n’entretenons pas la mémoire, nous sommes condamnés à répéter les erreurs. Les gens oublient – on penserait que ce n’est pas possible, et pourtant cela arrive. Nous devons nous rappeler combien la guerre est un gâchis et un fardeau. »